Entreprendre

Pourquoi le rebond entrepreneurial est-il en panne en France ?

Alors que nous voulons plus d’entrepreneurs audacieux, que nous sommes toujours à la recherche du Marc Zuckerberg français, nous condamnons toujours autant l’échec qui est systématiquement attribué au porteur de projet de sorte que ce dernier s’y assimile. Par Stéphane Cohen, président de l’Ordre des Experts-Comptables Paris Île-de-France.

Et pourtant Lao Tseu écrivait “l’échec est le fondement de la réussite”. Nous sommes bien loin de notre culture occidentale qui fait de la réussite une norme, condamnant ainsi de manière darwinienne ces aventuriers des temps modernes, nos dirigeants ayant connu l’infamie de l’échec.

 

Le prix du risque

Ces mêmes champions de la croissance perdue passent ainsi du rang de star du podium au statut tant dégradant de “débiteur”, terme consacré par la loi sur les faillites. Le processus d’auto destruction est en marche de sorte que nos jeunes start-upeurs craignant de subir le même sort, préfèrent aller tenter l’aventure outre atlantique. Et pour ceux qui sont déjà en France, le rebond devient impossible… Aux États-Unis, l’échec n’est pas stigmatisant. Bien au contraire, il est considéré comme faisant partie de la courbe d’expérience des dirigeants, qui analysent avec leurs conseils ses raisons objectives, comme pour mieux repartir en évitant les pièges du débutant. Les exemples sont nombreux, et en analysant le parcours des serial entrepreneurs de la Silicon Valley, nous trouvons des échecs suivis de succès fulgurants. Ce phénomène fait désormais partie de la culture d’expérimentation de la Silicon Valley où, à l’occasion de conférences de l’échec (fail conférences), sont exposés les cas d’échec pouvant servir d’expérience aux novices. L’échec est ainsi présenté comme le prix du risque. L’absence d’échec est même d’ailleurs perçue comme un facteur de risque par la communauté des financeurs. En Europe, ce phénomène est inversé. Les dirigeants ayant connu des liquidations continuent à être marqués au fer rouge par la communauté bancaire et financière, même après la suppression de la notation 040 (notation des dirigeants ayant ouvert une procédure de redressement judiciaire).

 

Mettre en place les bons vecteurs

Que dire également des entreprises ayant connu une avarie passagère, les ayant amenées à présenter un plan de continuation ou de sauvegarde, quand le Kbis comporte tout un chapitre sur la procédure collective pendant les 3 ou 5 premières années suivant leur homologation ? Comment rebondir même si les conseils autour du chef d’entreprises permettent de regagner jour après jour confiance en soi et en son business ? Si l’expert-comptable est incontournable pour assister le chef d’entreprise dans le retournement de son entreprise ou comme vigie alerte des difficultés à venir, il n’est pas non plus un magicien car, privé de banques, privé de financements, notre entrepreneur va peiner à gagner les points de croissance qui seront le salut vers la sortie de crise. Nos pouvoirs publics doivent désormais aller plus loin en tirant les conséquences de l’absence de rebond, et celles du départ outre atlantique de nos cerveaux, en inversant la culture et en la propageant au sein du système financier. La Banque Publique d’Investissement doit également servir de relais pour redémarrer, quand les banques classiques sont toutes en panne d’introspection, et profitons de son brillant président Nicolas Dufourq, qui dispose d’une réelle culture internationale, pour mettre en place les bons vecteurs. Il a déjà commencé en finançant des fonds spécialisés dans le retournement. Les Experts-Comptables, tiers de confiance de l’économie, sauront analyser avec leurs clients les échecs et partager ces expériences avec leurs autres clients. Alors, qu’attendons nous ?

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