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Quel contrôle de gestion pour quelles start-up ?

François Meyssonnier, professeur de contrôle de gestion à l’IAE de Nantes a étudié 8 start-up  de la région nantaise et leurs systèmes de pilotage de la performance dans des entreprises fondées sur la science  ; cela a permis de mettre en évidence la nature des outils de contrôle de gestion* développés dans ces PME en croissance, les modalités de cette structuration mais aussi le fait que les outils sont différents selon la nature de la start-up. Par exemple, une start-up fondée sur le marché aura besoin beaucoup plus rapidement de la mise en place d’outils de contrôle de gestion qu’une start-up plus ancrée dans la science comme les Bio-Tech. Voici son analyse.

 

La start-up n’est pas une PME classique. On peut la qualifier de PME entrepreneuriale dans son projet et de managériale dans ses méthodes ou de grande entreprise en miniature. Ceci se manifeste clairement dans le champ particulièrement significatif du contrôle de gestion.

Dans le processus de développement de la start-up, on remarque d’abord le faible impact des jeux sociologiques des acteurs classiques dans les PME (famille, expert-comptable généraliste, etc.) qui peuvent souvent être des obstacles au développement autonome d’une fonction DAF dans la PME et à l’outillage de gestion interne. La culture des dirigeants entrepreneurs qui sont pour la plupart issus d’écoles d’ingénieurs ou de management ou docteurs en sciences, est rationaliste et managériale et les experts-comptables et les partenaires qui les conseillent et les accompagnent dans le processus de développement de la start-up poussent à la structuration la plus rapide possible du système de pilotage de l’entreprise.

Si la start-up est un trop peu tournée vers le marché et n’intègre pas assez la valeur créée pour le client cela signera son échec.

Les dispositifs de contrôle de gestion des start-up qui réussissent semblent donc en général bien adaptés aux besoins. Ils ne sont pas ajustés ex post à la suite de la constatation de dysfonctionnements ou de carences mais sont souvent mis en place ex ante pour accompagner la croissance anticipée.

Le principal outil de contrôle de gestion utilisé dans les start-up : le budget de trésorerie

Le principal outil de contrôle de gestion utilisé dans les start-up émergentes encore à l’état de TPE avec un CA nul ou très faible est le budget de trésorerie pour le suivi des encaissements (y compris subventions ou aides diverses) et surtout des décaissements. Dans les start-up en développement, encore petites entreprises, le compte de résultat mensuel simplifié (permettant un suivi des produits et des charges) ainsi que les tableaux de bord opérationnels de production et/ou commercial sont souvent utilisés en plus du budget de trésorerie qui reste central.

Dans les entreprises moyennes high-tech, les outils habituels du contrôle de gestion apparaissent : comptabilité de gestion simplifiée fondée très souvent sur la ventilation forfaitaire des frais généraux sur la base des heures de travail (impact interne des modes de calcul nécessités par le CIR) ; système budgétaire (avec usage, plus pour la prévision que pour le contrôle) ; tableau de bord de pilotage global (mais rarement formalisé sous la forme d’une “balanced scorecard”).

On constate aussi une diversité des seuils de structuration du contrôle de gestion et la contingence des formes prises par cette structuration. Des dispositifs différents de pilotage de la performance sont mis en place selon que l’on a une activité de conception (ou de production à la commande pour quelques gros contrats et des revenus récurrents liés) ou bien une production en série pour une masse de clients à prospecter et exploiter.

Dans le premier cas (importance de la recherche et des gros contrats bénéficiant souvent d’aides publiques), on aura des contrats collaboratifs ou des liens forts avec les institutions de recherche et un recours important au CIR avec une faible instrumentation de gestion et pas de responsable en charge du contrôle de gestion. On utilisera essentiellement le budget de trésorerie, l’analyse des postes du compte de résultat et des indicateurs de gestion.

Dans le second cas (conquête d’une clientèle étendue et prestations productives répondant à une demande du marché), on utilisera largement les outils de contrôle de l’exploitation aussi bien dans l’activité commerciale que dans la production ainsi qu’une comptabilité de gestion souvent fondée sur les temps et un suivi budgétaire plus serré. Cette distinction mise en évidence par cette étude mériterait d’être vérifiée par une étude statistique permettant de valider la contingence des pratiques de contrôle de gestion par rapport à la chaîne de valeur : peu de contrôle si proximité à la science, plus de contrôle si proximité au marché.

 

* Le contrôle de gestion est l’ensemble des dispositifs formels qui garantissent la mise en œuvre du business model au niveau des processus opérationnels de façon efficace et efficiente.

Découvrir la vidéo de François Meyssonnier.

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