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Auto-entrepreneurs : “Il y a eu – 25 % d’inscriptions au régime en six mois”

Un an après son entrée en vigueur, la Fédération des auto-entrepreneurs dresse un bilan sévère de la Loi Pinel. À l’inverse de l’intention annoncée, celle-ci aurait complexifié le régime. Un rapport a été remis aux responsables politiques. Interview de Grégoire Leclercq, président de la FEDAE.

Jugez-vous le bilan de la loi Pinel, qui devait simplifier le régime d’auto-entrepreneur, uniquement négatif ?
Non. Dans le rapport nous montrons qu’il y a deux facettes. Une partie de la loi Pinel est favorable au développement économique, mais uniquement pour les auto-entrepreneurs déjà installés. Elle favorise la transparence et le professionnalisme. Par exemple dans certains cas, les auto-entrepreneurs doivent  démontrer qu’ils possèdent une assurance responsabilité civile. On peut aussi ajouter la baisse des taux de charge. Puis, il existe une facette négative que j’appelle le choc de complexification. Il touche les entrepreneurs à venir et crée de nouvelles barrières à l’entrée dans le régime. Cela concerne très clairement l’immatriculation et le stage.

Comment ces deux éléments ont-ils été complexifiés ?
À l’origine depuis 2009, le régime s’était fait une marque de fabrique en simplifiant à l’extrême les formalités d’inscription. Vous aviez besoin d’une connexion Internet, d’une carte d’identité et d’une copie de votre diplôme pour les métiers réglementés. Vous pouviez tout faire en ligne, vous étiez inscrit directement et vous ne payiez aucune procédure d’inscription. La loi Pinel est venue complexifier ceci très profondément. Elle a ajouté l’obligation pour tous les commerçants et les artisans de se rendre en Chambre de commerce ou de métiers pour s’inscrire. Nous ne sommes plus dans la dématérialisation car le dossier doit être imprimé. Il est extrêmement lourd à remplir avec une dizaine de pièces justificatives et la plupart du temps incomplet car il est trop compliqué. Des frais sont demandés par la Chambre de métiers ou de commerce pour remplir cette obligation que l’on appelle l’immatriculation. Le deuxième point est que ces commerçants et artisans doivent payer une taxe de plus, prélevée sur le chiffre d’affaires, pour les frais de Chambres. Alors qu’ils n’ont rien gagné en contrepartie car celles-ci n’accompagnement pas davantage les auto-entrepreneurs. Les artisans sont obligés de suivre le stage préalable à l’installation dont les auto-entrepreneurs étaient tous exonérés. Et là c’est vraiment le pompon. C’est un stage trop long, inadapté et très coûteux. Il freine beaucoup de personnes puisqu’elles ne peuvent pas commencer à travailler sans lui. Or il coûte 280 euros, ce qui est un investissement énorme pour quelqu’un qui se lance dans une petite activité complémentaire.

La complexification touche donc surtout les personnes qui veulent se lancer dans une activité artisanale ?
Dans une activité artisanale ou commerciale. Les commerçants ne doivent pas suivre de stage mais ils sont concernés par l’immatriculation. Donc cela touche environ 55 % des auto-entrepreneurs à venir. Car le ratio est d’à peu près 45 % de professions libérales et 55 % d’artisans et commerçants.

Quelles solutions préconisez-vous ?
Nous n’inventons rien. Nous avons deux laboratoires : pendant six ans l’absence de barrière à l’entrée et l’inverse pendant six mois. On voit le résultat. Le juge de paix ce n’est pas nous, ce sont les chiffres. L’Insee montre qu’il y a eu – 25 % d’inscription au régime en six mois. Pour l’instant, les pouvoirs publics jugent que ce n’est pas énorme. En réalité, ce chiffre est catastrophique. C’est autant de travail au noir qu’on ne pourra pas récupérer, de pertes fiscales pour l’État, de rentrées sociales en moins, de Français qui ne se lanceront pas dans l’entrepreneuriat et ne créeront pas d’activité économique, c’est donc du PIB en moins. La seule solution est de revenir à une simplification telle qu’elle a fonctionné pendant six ans. C’est-à-dire un système sans immatriculation et un stage très court et peu coûteux : maximum 50 euros et une journée.

Vous avez remis votre rapport à plusieurs responsables politiques dont Emmanuel Macron, avez-vous eu un retour ?
Non. Nous espérons en avoir un cette semaine. De toutes les façons, nous allons faire un peu de bruit du côté du gouvernement et des parlementaires pour que ce rapport soit pris au sérieux.

 

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